Pour commencer, peux-tu nous dire qui tu es, quel est
ton âge et nous raconter quelque chose de ton enfance ? Je suis un auteur-compositeur-interprète d'inspiration chrétienne. J'ai
plus de 40 ans, puisque je suis né le 19 décembre 1956 à Novara et la musique est mon
hobby principal. Quant à mon enfance, puisque ma famille était très pauvre, à l'âge
d'un an, ayant été frappé par la polio, on m'a éloigné des miens qui ne pouvaient
pas, faute de ressources, faire face à ma maladie et s'occuper de moi.C'est ainsi que
j'ai vécu jusqu'à l'âge de 15 ans dans des instituts de l'Assistance Publique. La vie
dans les différents instituts a été un véritable supplice, car j'aurais voulu de tout
mon cur rester dans mon ambiance, entouré de la chaleur des miens et vivre avec la
famille, avec les copains du même âge que moi, dans mon milieu d'origine.
Roberto, comment as-tu
vécu ta jeunesse, qui étais-tu et quelle idée de toi se faisaient tes amis et tes
connaissances les plus proches ? J'ai vécu une
jeunesse très tourmentée. En effet, l'expérience des instituts de l'Assistance Publique
m'a donné une idée de la vie qui ne correspondait pas à la réalité concrète à
laquelle j'ai dû faire face par la suite. En effet, une fois sorti de ces structures,
j'ai refusé toutes les personnes qui s'étaient occupées de moi jusqu'alors et je n'ai
pas voulu suivre les conseils que j'avais reçus à propos de l'étude, du travail et
autre car j'étais à la recherche de quelque chose de grand, d'une vie extraordinaire. Je
fus alors séduit pas une nouvelle manière de vivre qui était à la mode à l'époque,
la vie de la 'beat generation' ou des enfants des fleurs. Une réalité juvénile qui
prêchait la liberté la plus complète dans toutes ses formes, le refus total de la
société et des institutions. Avec ces jeunes, de qui je me sentais compris et avec qui
j'étais enfin à mon aise, j'ai vécu une expérience alléchante mais difficile, car on
vivait dans la gêne, sans une maison, sans un repas chaud. L'usage de la drogue était la
raison de l'union entre nous et notre raison de vie.En plus de cela, j'avais perdu tout
contact avec ma famille même si, au fond de mon cur, je gardais le désir de
retourner un jour voir les miens. Pendant cette période de ma vie, moi aussi, comme tant
d'autres garçons, j'ai passé quelque temps en prison à cause de la drogue ; une fois
sorti de prison, j'ai vècu le drame de la solitude et de l'exclusion, ce qui m'a poussé
à suivre une autre route : celle des mouvements révolutionnaires juvéniles, notamment
d' 'Autonomia Operaia'. L'expérience que j'entreprenais était liée à une idéologie
très dangereuse ; elle s'expliquait pourtant par mon désir profond de changer à tout
prix le monde que je jugeais injuste à l'ègard des faibles : je voulais surtout changer
le monde dont je me sentais victime. Mais là aussi j'ai dû changer d'avis et
reconnaître que la violence, qu'elle soit physique ou morale, ne mène à rien et
complique tout. J'ai donc décidé que c'était moi qui devais changer. C'est ainsi que je
suis sorti de ce groupe extra-parlementaire, tout en sachant que j'allais me retrouver
seul une fois de plus.
C'est justement dans cette période de grande détresse que j'ai retrouvé ce que, dès
mon enfance, faute de ressources, j'avais dû mettre de côté, c'est-à-dire mon goût
pour la musique. J'ai voulu alors démontrer à tout le monde que moi aussi, malgré mes
difficultés, je pouvais être quelq'un dans la vie. Je me suis alors mis à travailler à
la musique et j'ai commencé à fréquenter le milieu du spectacle, à faire les premiers
concerts avec des personnages aussi bien importants que modestes. je me suis imposé par
mes chansons d'amour jusqu'à quand, un jour, je suis retombé dans une sorte de désarroi
profond qui m'a mené à la solitude la plus complète. C'est à ce moment-là, où je ne
trouvais nulle part un peu de répit, que j'ai rencontré des garçons qui m'ont dit tout
simplement : " Jésus t'aime " .
J'en ai été profondément ému car jamais personne ne m'avait parlé de la sorte. Me
voilà alors fréquenter pendant quelque temps, non sans un petit peu de méfiance, ces
garçons. Malheureusement, lorsque je me suis aperçu que l'affaire allait prendre une
place importante dans ma vie, j'ai brusquement décidé de tout quitter et de partir pour
Paris, chercher de nouveaux succès dans le monde du spectacle. Je suis revenu en Italie
de cette aventure épuisé et déçu, mais j'ai eu la chance de rencontrer de nouveau les
mêmes garçons que j'avais quittés avant. Cette fois-ci ils m'ont raconté d'un endroit
en Bosnie-Herzègovine, Medjugorje, où l'on parlait d'apparitions de la Vierge Marie.
Dès que j'ai entendu leur récit, j'ai senti en moi un besoin impérieux de me rendre
là-bas ; c'est pourquoi en août 1984 je me suis rendu à Medjugorje avec trois amis.
Là-bas j'ai eu immédiatement l'impression d'être chez moi comme quand j'ètais petit et
que je rentrais en famille : le milieu qui m'accueillait ressemblait au milieu paysan,
humble et pauvre, de mon enfance. Et voilà qu'un grand désir de changer de vie s'est
emparé de mon âme : j'ai demandé finalement à Dieu la grace de la conversion du
cur afin que mon existence puisse devenir simple et humble en accord avec tout ce
que je vivais ces jours-là.
Une fois rentré en Italie j'ai senti que j'avais changé : j'ai commencé à prier, à
dire tous les jours mon chapelet et à aller à la Messe ; ma nouvelle vie m'a fait aussi
comprendre l'importance du don du chant ; c'est alors que j'ai écrit ma première chanson
à la Vierge, Chanson pour Marie.
Au début je craignais le jugement de mes anciens amis, je ne supportais pas l'idée de
quelques réflexions de leur part à mon égard et je trouvais des prétextes pour ne pas
les rencontrer. Mais un beau moment je me suis dit : " Je ne peux pas continuer à
refuser de les voir car, enfin, après tant de folies, voilà ma folie la meilleure. Je
devrais plutôt faire part à eux aussi de la joie et de la paix dont je jouis " .
C'est ainsi que, petit à petit, je leur ai raconté l'expérience que j'avais vécue ; ce
faisant, je me suis aperçu qu'il était important d'en parler, de seconder l'impulsion de
témoigner devant tous ceux que je rencontrais ma folie et mon amour pour Marie .
Quels ont été tes rapports avec la famille et quels
sont-ils actuellement ? Au début les rapports avec
mes parents étaient assez difficiles car j'étais persuadé d'avoir été abandonné ; en
mûrissant et surtout après la découverte de la foi, j'ai éprouvé pour eux une grande
tendresse et un sentiment de reconnaissance pour le don de la vie qu'ils m'avaient fait .
Parle-nous un peu de ta maladie. Comment la vis-tu,
quelles difficultés entraîne-t-elle, quel sens a-t-elle pour toi ? La maladie en soi n'a pas été un problème pour moi : ce sont plutôt
les regards et les propos des gens qui en ont fait un problème. Avec l'aide de Marie, mon
handicap s'est transformé dans un don de Dieu car à travers la souffrance j'ai
dècouvert l'importance de la Croix ; après tout, franchement, chacun d'entre nous a un
handicap, physique ou intérieur : il est donc bon que chacun s'accepte tel qu'il est.
En te retournant vers ton passé, comment vois-tu ta
vie ? Est-ce que le chemin pour arriver à Dieu a été assez facile pour toi ou bien
as-tu dû surmonter beaucoup d'obstacles ? Et lesquels ? Es-ce que tu pourrais comparer
ton histoire à celle de nombreux jeunes de nos jours ? Pourrais-tu être un exemple
éloquent pour la réalisation du projet de Dieu sur leur vie ? Ma vie passée aurait pu être un gros échec. A présent toutefois je la
considère positivement car à travers toutes mes souffrances et toute sorte d'obstacles
je suis arrivé à Dieu. C'est grâce aux épreuves que j'ai supportées que je peux être
à présent un témoin pour ceux qui vivent les mêmes drames ou les mêmes problèmes que
j'avais vécus et pour ceux qui ne réussissent pas à donner un sens à leur propre vie.
Je crois que les gens peuvent parfois tirer profit de l'expérience des autres : nous ne
sommes que des instruments pour que cela arrive. Il n'est certainement pas facile de
choisir la voie de Dieu ; les obstacles que l'on trouve sont nombreux ; mais Dieu donne
aussi la force pour les surmonter par les sacrements, par la prière et surtout par la
présence de Marie, qui a soin de nous et qui nous indique le juste chemin comme une bonne
maman.
Quelle est d'après toi ta vocation ? A quoi crois-tu
que le Seigneur t'a appelé ? Je crois que tout
homme a sa vocation : Dieu appelle tous . C'est à nous de répondre à son appel et de
Lui offrir nos talents afin qu'Il puisse aider les autres par nous. Aujourd'hui ma
vocation est ma famille ; je suis appelé à être mari, père et auteur-compositeur
d'inspiration chrétienne.
Pourquoi as-tu choisi de chanter ? Que signifie pour
toi la musique et que veux-tu transmettre par elle ?
Je chante parce que je suis musicien. Si j'étais peintre je peindrais, si j'étais un
employé je resterais au bureau. Chanter est donc ma façon de m'exprimer. Mes chansons
religieuses sont un moyen pour aider mon prochain à se rapprocher à Dieu : elles veulent
transmettre l'espoir, la foi et l'amour envers ceux qui souffrent, ceux qui sont à la
recherche de Dieu, ceux qui ont besoin d'un mot d'amour. Les messages que je lance sont
nombreux et ils peuvent parfois être une provocation : cependant je crois qu'aujourd'hui
il est important de lancer ce genre de messages par la musique puisque les jeunes en
entendent beaucoup ; je crois aussi qu'il est nécessaire d'entendre parler de Dieu dans
un monde qui cherche à nier son existence. Ainsi, chanter est devenu pour moi une mission
pour dire que Dieu existe. Je saisis l'occasion de cette interview pour renseigner le
public que mon dernier enregistrement sur disque Tempo di Pace est sorti aux Editions
Saint Paul .
Tout jeune perçoit la musique comme faisant partie
de lui-même ou bien comme un moyen pour exprimer son monde intérieur. Mais voilà
qu'elle, tout en ètant l'expression la plus pure des sentiments humains, peut
dégénérer dans des exagérations de toute sorte. Nous nous référons tout
particulièrement à la musique des discothèques, parfois 'démonisée' dans certains
milieux de l'Eglise. Qu'en penses tu en laïc et comment devrait être le milieu des
discothèques par rapport à la fonction de la musique ? Les jeunes écoutent une grande quantité de musique et ils en sont
attirés: il est donc normal qu'ils fréquentent les endroits où l'on joue de la musique.
Les discothèques sont des lieux de réunion et d'amusement pour beaucoup d'entre eux, un
véritable temple sacré où ils croient trouver un peu de distraction et de réconfort à
leurs difficultés, même à travers les drogues, le sexe et l'alcool ; en réalité ils y
trouvent une grande solitude et beaucoup de dèsespoir. J'estime par conséquent très
important que tout chrétien s'arme de foi et de courage pour aller au devant de ces
jeunes en essayant de comprendre leurs problèmes dans le but de les aider à trouver un
sens à leur vie. Il faut donner aux jeunes une amitié vraie et, pourquoi pas, leur
parler aussi de Dieu.
Pour ne pas encourir les lieux communs, je vous fais connaître l'expérience de deux
amis, un prêtre et une sur, qui vont, une soirée par mois et avec l'autorisation
de leur évêque, dans une des discothèques les plus fréquentées de leur zone pour
évangéliser. Et comment ? Ils se faufilent parmi les jeunes pour danser et petit à
petit ils leur parlent. Et il leur arrive n'importe quoi, dans le sens positif du terme,
bien entendu, car pas mal de jeunes se confessent, quelques-uns se rapprochent des valeurs
chrètiennes, d'autres au contraire s'échappent ou bien restent indifférents.
Je veux vous raconter deux épisodes concernant le prêtre et la sur dont je viens
de vous parler. Un soir le prêtre susdit va vers les toilettes de la discothèque, il y
entre et trouve qu'une dispute violente a éclaté entre deux garçons ; ceux-là le
regardent d'un air de défit et lui demandent : " Que fais-tu ici, prêtre ? "
Il les regarde et leur dit tout bonnement : " Je dois aller au W.C . " En
sortant après des toilettes, il s'aperçoit que les garçons le regardent et qu'ils ne se
battent plus : pendant toute la soirée ils ne se sont plus battus.
Une autre soirée un garçon, pour se moquer de la sur qui se trouve dans la
discothèque, s'approche d'elle, lui enlève la voile et y marche dessus. Tout en
continuant à danser, la sur ramasse son voile et le remet sur sa tête en souriant.
Le garçon est sorti de la discothèque honteux et n'y est plus revenu. Est-ce que vous
comprenez à présent ce que la force du vrai amour peut faire ?
Ta voix est très connue surtout grâce à la
Ballade pour Marie par laquelle tu as réussi à entrer dans la vie quotidienne d'un grand
nombre de gens. Peut-être y a-t-il un auditeur qui ne connaît pas celui qui se cache
derrière ces notes et qui ne sait pas quel est l'esprit qui t'anime quand tu chantes pour
Marie : nous aimerious que tu manifestes ce qui t'inspire lorsque tu chantes cette
chanson. Ballade pour Marie est un signe d'amour et
de reconnaissance pour ce que la sainte Vierge a su me donner et a voulu faire de ma vie.
Marie est la mère de tous, qui a touché non seulement mon cur mais aussi celui de
tant d'autres jeunes. Elle est une source infinie de grâce et un exemple d'humilité et
de charité, face auquel tout homme doit baisser la tête. Ballade pour Marie est une
chanson qui m'a donné la possibilité d'aborder d'autres auteurs-compositeurs qui
avaient, eux aussi, une grande dévotion pour la Vierge afin de la couronner avec une
'compilation' de chansons d'artistes chrétiens de tous les pays, au titre Ballade pour
Marie - Edition Mir Shalom. La recette entière des ventes de cette collection a étè
affectée aux enfants de Bosnie, que le cur de Marie n'a sûrement jamais
abandonnés.
Roberto, il t'arrive souvent de faire des concerts
pour des jeunes : n'as-tu jamais pensé à leur adresser de la scène une invitation à
suivre le Seigneur Jésus, en leur avançant une proposition claire d'appel religieux ? je crois que l'on ne doit pas imposer aux jeunes Dieu et la religion, on
doit plutôt les proposer par l'exemple et par le témoignage. Quand je parle aux gens ou
au public je leur parle de Jésus en tant que père, ami et frère qui m'accompagne dans
la vie. C'est un grain que je lance et que Jésus fera germer, s'Il le veut, au cur
de ceux qui m'écoutent.
Pour terminer, quel message voudrais-tu communiquer
aux jeunes qui vont lire ton témoignage et qui se trouvent à mi-chemin dans la voie vers
le Christ qui les appelle, surtout quand ils connaissent la difficulté de tout quitter
pour Le suivre ? Aux jeunes je peux dire que la voie
qui porte au Christ est la plus gratifiante même si parfois elle peut paraître difficile
à cause des renoncements et des sacrifices qu'elle exige, car ella va à rebours de ce
que le monde propose. Il ne faut cependant pas perdre courage, mais essayer de prendre sa
propre croix comme Jésus a fait avant nous et de Le suivre. Les forces pour faire cela ne
nous feront pas défaut si nous avons recours aux sacrements, à la prière et à
l'Evangile ; ces moyens sont comme des panneaux de signalisation qui nous indiquent le
chemin pour aller au Cur de Jésus. Voici le vu le meilleur que j'adresse à
tous, y-compris moi-même : aller à ce Cur.